Hubertine Auclert naît dans un petit village près de Montluçon, dans une famille assez aisée et très religieuse. Elle s’enfuit du couvent d’abord pour aider sa mère à secourir des filles-mères sans ressources, puis pour filer à Paris et voler de ses propres ailes. Surnommée la Suffragette française  en référence aux militantes anglaises, très actives et radicales dans leurs actions, Hubertine Auclert, fonde, en 1876, la société Le Droit des femmes qui deviendra en 1883 Le Suffrage des femmes. 

Militante, journaliste, essayiste, Hubertine Auclert s’est battue toute sa vie non seulement pour les droits civils des femmes, mais aussi pour leurs droits politiques. Et on lui doit l’utilisation du mot « féministe », inventé de façon moqueuse par Alexandre Dumas fils, elle s’en empare et l’arbore fièrement dans ses édito et écrits.

En 1879, au Congrès ouvrier socialiste de Marseille, elle déclare :

« … Si vous, prolétaires, vous voulez aussi conserver vos privilèges, les privilèges de sexe, je vous le demande, quelle autorité avez-vous pour protester contre les privilèges de classes ? Que pouvez-vous reprocher aux gouvernants qui vous dominent, qui vous exploitent, si vous êtes partisans de laisser subsister dans l’espèce humaine des catégories de supérieurs et d’inférieurs ? (…) »

En 1880, elle  entame une grève de l’impôt et déclare dans une lettre à  son Préfet :  « Je n’admets pas cette exclusion en masse des femmes, qui n’ont été privées de leurs droits civiques par aucun jugement. En conséquence, je laisse aux hommes qui s’arrogent le privilège de gouverner, d’ordonner, de s’attribuer les budgets, le privilège de payer les impôts qu’ils votent et répartissent à leur gré. (…) Je n’ai pas de droits, donc je n’ai pas de charges ; je ne vote pas, je ne paye pas. »

En 1881, elle crée le journal La Citoyenne, dans lequel elle écrit : "Il faudrait que nous soyons des créatures folles et insensibles pour ne pas nous occuper de politique. »

Elle vit quelques années en Algérie, avec son mari, l’avocat Pierre Antonin Lévrier qu’elle a rencontré et qui l’a conseillé quand elle faisait sa grève de l’impôt. En Algérie, elle s’oppose à la politique coloniale de la France, dénonce le racisme, l’antisémitisme et l’exclusion des femmes musulmanes de la vie publique. Et fait, elle est une des premières à le faire,  un parallèle entre le sexisme et le racisme colonial. Même si dans son esprit traînent encore parfois des relents racistes inacceptables, comme quand, en colère de voir les hommes noirs obtenir le droit de vote dans les colonies françaises, elle écrit cette phrase insupportable en opposition avec tout ce qu’elle revendique par ailleurs : « Le pas donné aux nègres sauvages, sur les blanches cultivées de la métropole, est une injure faite à la race blanche. ».

Après son retour en France, en 1910, elle se présente illégalement aux élections législatives pour défendre le droit de vote des femmes, en même temps qu’entre autres Madeleine Pelletier et Marguerite Durand. 

Il faudra attendre 1944 pour que les françaises obtiennent ce droit, Hubertine Auclert ne vivra pas cette victoire, elle meurt en 1914, juste avant la Première Guerre Mondiale.