Emilienne Moreau-Evrard

Enseignante et résistante française

Née le 4 juin 1898 à Wingles dans le Pas-de-Calais, décédée le 5 janvier 1971 à Lens, à l’âge de 72 ans.


 

Emilienne Moreau-Evrard a la particularité d’avoir été très honorée et d’être aujourd'hui pratiquement inconnue du grand public.

Emilienne Moreau est née le 4 juin 1898 à Wingles dans le Pas-de-Calais. Son père, mineur à la retraite, ouvre en juin 1914 une épicerie-mercerie à Loos-en-Gohelle à quelques kilomètres de Lens. D’où ce nom qu’on lui donne souvent d’Héroïne de Loos. Emilienne Moreau se destine à la carrière d’institutrice, mais la Grande Guerre éclate. A Loos, elle subit l'occupation allemande à partir d'octobre 1914. Après  la mort de son père, en décembre 1914,  elle  s’engage dans différents actes de résistance face à l’armée allemande (arrachage d’affiches, transmission d’informations) et crée une école clandestine, dans une cave.

Le 25 septembre 1915, alors que l’armée britannique contre-attaque pour reprendre la ville de Loos, Emilienne Moreau qui n'a que 17 ans, s'empresse d’aller à leur rencontre pour leur communiquer les positions ennemies.
Grâce à ces indications, les Britanniques contournent et réduisent l’ennemi avec des pertes minimes. Immédiatement, Emilienne, avec un médecin écossais, organise dans sa maison un poste de secours, y transportant pendant vingt-quatre heures tous les blessés qu’elle trouve. 

Pour sauver un soldat anglais pris sous la mitraille, elle n'hésite pas à sortir de son abri, armée de grenades, et parvient à mettre hors d'état de nuire deux soldats allemands, embusqués dans une maison voisine. Un peu plus tard, alors que la maison est cernée, elle se saisit d'un revolver et abat à travers la porte deux fantassins ennemis. La ville est reprise par les Britanniques. 

Elle est décorée de la Croix de Guerre avec palme et de la Croix du Combattant. Les Britanniques lui décernent aussi la Médaille militaire et la Red Cross.


Elle passe ses diplômes et devient institutrice. Elle écrit aussi dans plusieurs journaux, et milite à la fédération socialiste du Pas-de-Calais. 

Au lendemain de l'Armistice de juin 1940, connue pour ses actions anti-allemandes en 14-18, Emilienne Moreau-Evrard est placée en résidence surveillée.
Ce qui ne l’empêche pas de commencer à distribuer des tracts et des brochures contre la capitulation et le maréchal Pétain, et d’entrer en contact avec l'Intelligence Service à laquelle elle fournit de précieux renseignements. Avec Just Evrard qu’elle a épousé en 1932, elle constitue fin 1940 la section socialiste clandestine de Lens. 

Après plusieurs péripéties le couple se retrouve à Lyon où Emilienne devient agente de liaison du réseau Brutus, puis du mouvement La France au Combat. Repérée par la Gestapo, elle rejoint Londres et encourage notamment les femmes à résister en se faisant une des voix de la BBC.

Elle est à nouveau décorée de la croix de Guerre, ainsi que de la Croix du combattant volontaire de la Résistance et de la Légion d'honneur.
Elle est l’une des six femmes (sur 1038) décorées de l’Ordre de la Libération, distinction honorifique créée par le général de Gaulle pour récompenser des actes de résistance. Ce nombre ridicule ne reflète aucunement la réalité de l’engagement des femmes dans la Résistance (il est même une forme d’insulte faite au réel et au courage des femmes). L'historienne et résistante Rolande Trempé, dans le documentaire qu’elle consacre à la représentation de l’action des femmes dans la Résistance, à propos des commémorations dit : « Je suis allée à la première, et puis, j’ai arrêtée. (...) Anciens combattants, on dit que ça recouvre aussi bien les femmes que les hommes, mais en réalité, il n’y a jamais que les hommes qui sont honorés. ».

Après la guerre, elle poursuit ses activités militantes et est membre du comité directeur de la SFIO (ancêtre du Parti socialiste) de 1945 à 1963.

 


En savoir +

 

"Ce sont pour la plupart, des femmes qui font les liaisons des groupes de résistance, ce sont des femmes qui portent et distribue souvent les journaux et les tracts. Ce sont encore des femmes qui, revenant fourbues, lasses, épuisées, rapportent aux organisations les renseignements sur la concentration des troupes."

 

Conférence de presse BBC, Londres 15 août 1944

Emilienne Moreau-Évrard

 


A lire



Émilienne Moreau-Evrard à Londres en 1944.