Micheline Maurel

Ecrivaine et résistante française

Née le 17 juillet 1916 à Toulon, morte le 10 juillet 2009 à Toulon, à l'âge de 92 ans.


 

Micheline Maurel est fraîchement installée à Lyon, où elle prépare son agrégation de Lettres Classiques, quand la guerre éclate. Elle entre dans la Résistance dès l'été 1940, d'abord dans un réseau d'évasion et d'information organisé par des aviateurs polonais en poste à Lyon, puis dans le réseau Marco Polo, mis en place par le BCRA (les services secrets de la France Libre). Arrêtée par la Gestapo le 19 juin 1943, elle est déportée le 29 août à Ravensbrück, puis est transférée dans son annexe de Neubrandenburg, sous le matricule 22 410. Durant toute sa déportation elle parvient, malgré un état de faiblesse extrême, à écrire. Elle rapportera plusieurs poèmes en quittant le camp de concentration en avril 1945. Après un long et douloureux périple à travers une Allemagne à feu et à sang, elle rentre  à Toulon en mai 1945. Elle enseigne de 1946 à 1948, en France et en Angleterre, puis travaille comme traductrice à l'Organisation mondiale de la santé au siège de Croix Rouge internationale à Genève. En 1957, elle publie aux éditions de Minuit Un camp très ordinaire, récit de captivité fort et sans concession, qui obtient le Prix des Critiques. Suivront le roman La Vie Normale, le recueil de poèmes La Passion selon Ravensbrück, ainsi que des contes pour enfants, Him-Li-Co, Hatier, 1958. Contes d'Agate, Hatier, 1970. et deux autres recueils de poèmes, De douleur et d'espoir - Poèmes à Magali et Au soleil du soir, parus en 1999 et 2000 à La Lucarne Ovale.

 

Plusieurs de ses poèmes ont été mis en musique par Joseph Kosma (La Grande Nuit -Ravensbrück) et chantés entre autre par Jany Sylvaire déportée dans le même convoi le 29 août 1943. La Vie normale a été adaptée au cinéma par André Charpak.

A la fin de sa vie, de retour en France, Micheline Maurel témoigne dans les collèges et lycées de son expérience concentrationnaire.

 

Micheline Maurel a été décorée de la Croix de Guerre avec palme, de la médaille commémorative des services volontaires dans la France Libre et de la Légion d'Honneur.

 

En 2016, son frère, Olivier Maurel, fait paraître un choix de ses lettres et écrits de guerre sous le titre Danse au bord du précipice, L'Harmattan. En mai 2022, à l'initiative d'Anne Monteil-Bauer, fondatrice de Si/si, les femmes existent, qui en rédige la présentation, les éditions À plus d'un titre rééditent en un volume La Passion selon Ravensbrück et La vie normale accompagnées de dessins inédits de l'autrice réalisés à son retour, à l'été 1945.

 

En mai 2022, Anne Monteil-Bauer crée également la lecture performance Maurel, tentative pour un dialogue imaginaire.

 


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Textes extraits de : 

Un camps très ordinaire

La Passion selon Ravensbrück,

Danse au bord du précipice.

 

C’étaient des femmes et il y en avait des milliers 

mais la chose était pour chacune.
Quand je les ai connues
chacune d’elles avait été injuriée et battue 

frappée à la tête au visage et partout 

jusqu’au sang

 

 

La Passion selon Ravensbrück (1950)

Micheline Maurel

 

"Le camp a longtemps gardé une réalité plus intense que le monde qui m'entourait. J'étais hantée (et parfois je le suis encore) par les visages de Neubrandebourg. Des centaines, des milliers de visages, maigres, pointus, ricanants, verts de froid, désespérés, ou qui essayent de sourire, ou qui ont déjà le sourire permanent des squelettes."

 

Micheline Maurel

in Un Camp très ordinaire

 

A lire

Il faudra que je me souvienne

 

Il faudra que je me souvienne
Plus tard, de ces horribles temps,
Froidement, gravement, sans haine,
Mais avec franchise pourtant.
De ce triste et laid paysage
Du vol incessant des corbeaux,
Des longs blocks sur ce marécage,
Froids et noirs comme des tombeaux.
De ces femmes emmitouflées
De vieux papiers et de chiffons,
De ces pauvres jambes gelées
Qui dansent dans l’appel trop long.
Des batailles á coups de louche,
À coups de seau, á coups de poing,
De la crispation des bouches
Quand la soupe n’arrive point.
De ces « coupables » que l’on plonge
Dans l’eau vaseuse des baquets
De ces membres jaunis que rongent
De larges ulcères plaqués.
De cette toux à perdre haleine,
De ce regard désespéré,
Tourné vers la terre lointaine,
O mon Dieu, faites-nous rentrer!…
Il faudra que je me souvienne…

(Automne 1944)

Micheline Maurel

in La Passion selon Ravensbrück