Niki de Saint Phalle

Sculptrice française

© Erling Mandelmann (1964)
© Erling Mandelmann (1964)

Née le 29 octobre 1930 à Neuilly-sur-Seine, morte le 21 mai 2002 à San Diego, à l'âge de 71 ans.

Plasticienne, à la fois sculptrice, performeuse, peintresse et réalisatrice, Niki de Saint Phalle naît le 29 octobre 1930. Fille d’un père français et d’une mère américaine, Catherine Marie-Agnès Fal de Saint Phalle est rebaptisée Niki par sa mère quatre ans plus tard. Son enfance et son adolescence se peuplent de révolte et d’une grande volonté de liberté. À ce sujet, elle déclare dans son ouvrage Traces, une autobiographie 1930-1949 : « Papa disait que toute personne était libre de choisir sa voix et que personne ne pouvait lui dire quoi faire. » Marquée par les idées progressistes de son père, Niki de Saint Phalle ne pouvait concevoir que sa mère puisse vouer sa vie à son foyer. « L’idée de devenir comme elle me terrorisait. » écrit-elle. Pourtant ce père tant admiré va la violer, secret enterré jusqu’en 1994 qui irriguera son œuvre. 

 

De son séjour à Paris à l’âge de quinze ans jusqu’aux couvertures de Vogue Paris et Life Magazine deux ans plus tard, pour lesquelles elle pose en tant que mannequin, sans se prendre au sérieux, chacun des éléments de sa biographie alimentera son œuvre. 

À l’automne 1948, Niki de Saint Phalle retrouve un ami d’enfance de son frère Jean : Harry Mathews. Ils se marient rapidement et très jeunes, comme le voulait sa mère et la pression sociale. En 1950, le couple s’installe dans le Massachusetts. Niki de Saint Phalle commence à peindre en autodidacte ses premières huiles et gouaches. Un an plus tard naît leur fille Laura. En 1952, fuyant le Maccarthysme, ils voyagent en France, en Espagne et en Italie, visitant les musées et cathédrales.

À l’automne 1952, le couple s’installe à Paris. Durant cette période, Niki de Saint Phalle lit beaucoup, elle est particulièrement impressionnée par Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir.

À l’été 1953, elle traverse une grave crise. Internée durant six semaines à Nice, elle est diagnostiquée, à tort, comme étant « schizophrène ». Elle subit un traitement à l’insuline et des électrochocs. Elle se met à peindre et à faire des collages. Sortie de son hospitalisation, elle reçoit une lettre de son père avouant l’avoir violée lorsqu’elle avait onze ans. 

Ce n’est qu’en 1994 que Niki de Saint Phalle racontera cet événement dans Mon secret, livre manuscrit sous forme d’une lettre adressée à sa fille Laura. Dans cet écrit, elle défend l’importance d’avoir des lois protégeant les enfants de certains adultes :

Niki de Saint Phalle montre la lettre de son père à son psychiatre. Celui-ci la brûle et déclare qu’il est impossible qu’un homme de sa classe sociale ait pu faire cela.

Peindre l’ayant aidée à guérir, Niki de Saint Phalle décide de se consacrer à la création artistique. À Barcelone, en 1955, elle est fascinée par le Parc Güell d’Antoni Gaudi qui l’inspirera à la fin des années 1970 lorsqu’elle débutera la construction du Jardin des Tarots. La même année naît son fils Philip. Sa première exposition se fait en Suisse en 1956 sous le nom de Niki Mathews.

 

Elle s’installe ensuite dans un atelier impasse Ronsin à Paris, impasse où réside de nombreux artistes. Elle y rencontre Jean Tinguely et sa femme Eva Aeppli, dont elle sera très proche toute sa vie. En 1959, Niki de Saint Phalle découvre avec intérêt les œuvres de Jackson Pollock et Jasper Johns. 

L’année suivante, elle se sépare d’Harry Mathews qui assume la garde des enfants. Elle poursuit ses expériences artistiques sous la forme d’assemblages en plâtre et tableaux. La même année, elle participe à la création du groupe des Nouveaux Réalistes. Niki de Saint Phalle s’installe impasse Ronsin et partage un atelier avec Jean Tinguely, qui devient son compagnon. Tout en poursuivant leur œuvre chacun de leur côté, ils entretiennent un dialogue artistique permanent. Elle rencontre Pontus Hultén, historien de l’art suédois, futur directeur du Moderna Museet à Stockholm, puis du Centre Pompidou, qui comprend tout de suite qu’il a affaire à une grande artiste.

 

En 1961, Niki de Saint Phalle expose Hors d’œuvre ou Portrait of My Lover au musée d’Art moderne de Paris. L’œuvre, composée d’une cible implique la participation du public invité à lui lancer des fléchettes. Ce procédé participatif a une grande place dans l’œuvre de Niki de Saint Phalle. 

La même année, elle organise sa première séance de Tirs. Elle signe maintenant Niki de Saint Phalle.

Durant les années 1960, elle réalisera des œuvres en réaction au contexte politique des États-Unis (Autel O.A.S, 1962 ; King Kong, 1963), à son traumatisme (Paysage de la mort (Collage de la mort), 1960) et à son éducation chrétienne stricte (L’Autel des innocents, 1962). 

Elle débutera également une réflexion sur les différents rôles imposés aux femmes l’amenant à créer : Lili ou Tony, 1965 ; Accouchement blanc ou Ghea, 1964 ;  La Mariée ou Eva Maria, 1963 ; The White Goddess / La Femme brune, 1963 ; Devouring Mothers, 1970 ; Monster Woman, 1963 ; La Sorcière rouge, 1963 ; Leto ou La Crucifixion, 1965).

En mars 1965, débutent les revendications du Black Power. Sensibilisée très jeune au racisme, Niki de Saint Phalle réalise des Nanas noires (Nana noire upside down, 1965-1966) qui seront exposées en 1966 à New York et rend hommage aux héros de la communauté africaine-américaine dans sa série Black Heroes à la fin des années 1990.

En 1965 apparaissent les premières Nanas (Elizabeth, Bénédicte, Clarisse). L’année suivante elle expose au Moderna Museet de Stockholm Hon/Elle, une Nana géante dans laquelle le public entre par le vagin. Elle fait sensation. Des Nanas gonflables voient le jour en 1968.

En 1968, Niki de Saint Phalle expose ses sculptures monumentales dans des lieux publics (Le Paradis fantastique, 1968 ; Le Cyclope, 1969 ; Le Golem, 1971).

Au milieu des années 1970, Niki de Saint Phalle commence à réfléchir à l’élaboration de son futur Jardin des Tarots qu’elle finance elle-même grâce à la vente de parfums dont elle fait le design. Le Jardin des Tarots ouvrira au public en 1999.

À la fin des années 1980, Niki de Saint Phalle aide la cause du SIDA en écrivant et illustrant le livre AIDS : You Can’t Catch it Holding Hands, qui sera distribué dans les écoles. 

Niki de Saint Phalle, ayant inspiré pendant tant d’années les gaz toxiques du polyester, s’éteint en 2002 à 71 ans des suites de son insuffisance respiratoire chronique.

 

Morgane Gauquier

Etudiante en Histoire de l’Art à l’Université Lyon II,

 

en stage chez Si/si au printemps 2021

 

 

Extrait de Mon Secret, 2010, ed La Différence

 


A voir

1. - Accouchement blanc ou Ghéa, 1964  Collection particulière . 2. - Gwendoline, 1965  © Spengel Museum, Hanovre. 3.  - Elisabeth, 1965, Musée d'Art moderne et contemporain, Strasbourg. 4. - Niki de Saint-Phalle en train de viser, 1972 © Photo rehaussée de couleur extraite de son film Daddy. 5.- Black standing Nana, 1995 © collection particulière. 6. Nana noire gonflable, 1968. 7. Jardin des Tarots, Pescia Fiorentina, Capalbio, Italie. 


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